Une jeune conductrice a été condamnée en première instance à une amende de 600.- Euros et une interdiction de conduire de 20 mois intégralement assortie du sursis pour avoir roulé sans être titulaire d’un permis de conduire. Comme elle était en outre impliquée dans un accident de la circulation, l’infraction pour coups et blessures involontaires a été retenue à sa charge et un partage de responsabilité de 75% pour la conductrice et de 25% pour la personne âgée qui avait traversé la nuit et sous la pluie la route en dehors d’un passage pour piétons, a été instauré.
La conductrice a interjeté appel contre ce volet civil en arguant que le comportement de la vieille dame présentait pour elle les caractéristiques de la force majeure à savoir, extériorité, imprévisibilité et irrésistibilité et qu’il n’y avait partant pas lieu de retenir sa responsabilité dans cet accident.
Extériorité : l’événement est extérieur par rapport à la personne en cause
Imprévisibilité : on considère que si un événement est prédit, on pourra prendre les mesures appropriées pour éviter ou limiter le préjudice. Ne pas l’avoir fait est considéré comme une faute.
Irrésistibilité : elle indique que l’événement est insurmontable, celui-ci n’est ni un simple empêchement ni une difficulté. Il faut qu’il ait été impossible pour la personne en cause, pendant l’événement, d’agir autrement qu’elle ne l’a fait.
Il résultait du dossier répressif qu’au moment de l’accident il faisait nuit, que l’éclairage était médiocre, qu’il pleuvait, que la partie civile âgée de 68 ans traversait la chaussée dans un virage et à une distance de plus ou moins 30 mètres d’un passage pour piétons, pour rejoindre sa voiture garée en face.
La Cour d’Appel a déduit de toutes ces circonstances « que la traversée hasardeuse de la chaussée par la victime de l’accident est autrement plus imprudente et déraisonnable que le fait pour la conductrice de ne pas avoir été en mesure d’arrêter le véhicule conduit par elle dans les limites de son champ de visibilité vers l’avant » (Et même si cette dernière n’avait jamais passé son permis de conduire)
La Cour d’Appel a en outre décidé que le comportement de la victime n’était pas irrésistible et imprévisible pour la conductrice alors que cette dernière avait avoué lors de l’interrogatoire par la police qu’elle a vu traverser la victime, mais trop tard, pour freiner à temps.
Si cette dernière déduction reste fragile dans sa construction logique (alors que dans quasiment chaque accident, le conducteur se rend compte une fraction de seconde avant la collision, que cette même collision est inévitable), la Cour d’Appel a néanmoins retenu, par réformation, une responsabilité de l’ordre de 25% dans la genèse de l’accident à charge de la conductrice et une responsabilité de 75 % à charge de la piétonne.
Me Luc MAJERUS
Avocat à la Cour